Le Maroc en Version Sensible

COLLAGE_MAROC1.png

Je n’ai encore jamais rencontré la journaliste Khadija Moussou, qui est née et vit à Paris. Mais par un heureux hasard, je suis un jour tombée sur son compte Instagram @Limoun_Limoun. Tout en textes et photos frappés de soleil, de sucre et de souvenirs, le compte de Khadija m’a momentanément réconciliée avec Instagram. Au fil des posts, je ne scrollais plus à vide : je partais à la rencontre de son Maroc, celui des vacances d’été en famille. Ce compte à la poésie singulière m’a d’ailleurs inspiré la création d’un format : VS. “Version Sensible”, le portrait d’un bout du monde par les cinq sens. Première occurrence, donc, avec le Maroc en Version Sensible de Khadija Moussou.

Le goût

Dès lors que je pose le pied au Maroc, peu importe la ville où j’atterris, je ne bois que du thé à la menthe. Le matin au petit déjeuner avec des crêpes baghrirs, à midi pour accompagner des brochettes de kefta et une salade marocaine, ou en fin de journée avec quelques fekkas salés. Il n’y a pas un moment où le goût de la menthe chaude ne va pas m’arracher un sentiment de plaisir. J’aime son âpreté quand la menthe est associée à l’absinthe comme dans la région du Souss, sa douceur quand je savoure la mousse sur le bord du verre beldi. J’aime l’idée qu’il plaise aussi bien aux chauffeurs de taxi bougons qu’aux coquettes du quartier Anfa de Casablanca, aux adolescentes qui sèchent les cours comme aux chibanis installés dans les rues bleues de Chefchaouen, aux touristes comme aux femmes berbères qui travaillent l’argan… 

La vue

Il n’y a pas vraiment de monument, d'œuvre, de quartier ou de vue qui me touche plus que la lumière même du Maroc. Couleur curcuma, puissante et chaude. J’aime la voir dorer doucement ma peau. J’adore la regarder tatouer les murs blancs de palmiers centenaires, se diffuser à travers les moucharabiehs d’un riad de Fès, brûler le sable des plages d’Al Hoceima ou réconforter les corps des chatons endormis de Marrakech. Pour moi, la lumière du Maroc est une des rares choses qui rime toujours avec « vacances».

Le toucher

L’une de mes activités  préférées, depuis que je suis enfant, est de passer ma main sur les étoffes des couturiers marocains : velours, mousseline de soie, satin duchesse, dentelle, brocard, organza, crêpe de coton, lamé… J’ai un amour infini pour les caftans, ces belles robes marocaines que l’on porte pour les grands évènements. Je ne compte pas les heures passées chez les stylistes de Rabat pour choisir les bonnes couleurs à associer et les différents tissus à marier, ni celles passées à hésiter entre deux sfifas, à passer mon doigt sur chaque aaked, à jouer avec les pompons de fermeture des mdemmas ou à tresser les fils d’or torsadé. 

L'ouïe

Je pense que beaucoup de gens résumeraient le Maroc à un joyeux brouhaha avec en fond la voix du muezzin, évoquant instantanément la place Jemâa El Fna de Marrakech. Mais quand je ferme les yeux, ce que j’entends, c’est le bruit d’une radio grésillante qui diffuserait de la vieille musique marocaine. Au café du port d’Essaouira, dans les allées du souk d’Agadir, sur le marché du Mâarif de Casablanca, sur la plage de Tétouan ou chez le vendeur de chebbakias de Rabat, vous verrez toujours (oui même aujourd’hui !), un petit poste de radio qui diffuse les douces voix d’Abdelwahab Doukkali, de Nass El Ghiwane ou encore d’Amina Alaoui. 

L'odorat : J’en parle souvent dans mes billets mais la fleur d’oranger est vraiment le parfum du Maroc. Cette odeur douce et sucrée marque réellement le quotidien des Marocains. Elle parfume une salade d’oranges ou une infusion de verveine citronnée, des briouates aux amandes ou un quatre-quarts. Elle embaume les cimetières le vendredi matin, elle révèle les dessins au henné sur les mains de la jeune mariée, elle accueille joliment les invités en faisant atterrir des gouttelettes sur leurs épaules. Et depuis quelques temps, les Marocaines en aspergent même leurs masques avant de sortir ! 

Précédent
Précédent

Lisbonne sur le pouce (ou plein les doigts)

Suivant
Suivant

Douro Paraíso